PARDON Jacqueline
Défense de la France
Auteur de la fiche : Cécile Vast (fiche rédigée dans le cadre du dvd-rom La Résistance en Ile-de-France, édition AERI, 2004)
Jacqueline PARDON
Jacqueline Pardon est née à Paris le 4 septembre 1921 dans une famille appartenant à la bourgeoisie libérale, aux idées de droite mais peu politisée. Son père est industriel, sa mère une catholique pratiquante, très attachée à la religion. Une bonne partie de sa famille a été anti-dreyfusarde. Jacqueline Pardon effectue toute sa scolarité au collège religieux de Notre-Dame de Sion où elle est amenée à assister à une conférence du père Yves de Montcheuil, théologien jésuite qui met en garde contre l’idéologie nazie et son esprit anti-chrétien. Très catholique, très pratiquante, elle adhère aux Jeunesses étudiantes chrétiennes (JEC) ; elle conserve cependant tout au long de son adolescence des préjugés et une méfiance à l’égard en particulier des Juifs récemment immigrés en France.
Elle passe son baccalauréat de philosophie puis décide de poursuivre des études de philosophie à l’université de Caen. C’est en Normandie qu’elle vit la défaite de son pays. Son père est mobilisé comme officier de réserve aviateur. Quant à elle, après un long périple en compagnie de sa soeur qui les mène sur les routes de l’exode entre la Normandie et la Loire, dans un premier temps rassurée par le discours du maréchal Pétain, elle rejoint sa mère à Paris.
Jacqueline Pardon reprend ses études de philosophie en Sorbonne en octobre 1940. Dans un cours de soutien, animé par deux agrégatifs, Robert Salmon et Philippe Viannay, elle présente un exposé sur « le goût du risque ». A la suite de cet exposé, Philippe Viannay, intéressé par sa personnalité, propose en février 1941 à Jacqueline Pardon de participer au mouvement qu’il est en train d’organiser, Défense de la France.
Cet engagement entier dans le mouvement de Philippe Viannay se fait avec quelques hésitations, quelques scrupules ; de fait, elle reste alors très marquée par sa fréquentation assidue du milieu catholique, et très influencée par son confesseur, qui réprouve ses choix d’engagement résistant. C’est la rencontre d’un père jésuite, le père Beinaert, qui la conforte dans sa volonté et l’encourage à s’engager pleinement dans la clandestinité. Ainsi, d’octobre 1942 à mai 1943, Jacqueline Pardon prend en charge, avec d’autres responsables du mouvement, la fabrication de faux papiers, la diffusion et le recrutement.
Comme la plupart des femmes engagées dans le mouvement, elle ne rédige aucun article pour le journal et n’a aucune responsabilité éditoriale ou politique. Par ailleurs, elle prête le pavillon de ses grands-parents maternels, situé au 121 rue d’Alésia à Paris, au mouvement ; Philippe et Hélène Viannay y sont hébergés en 1943, et le pavillon sert de PC, de lieu de fabrication du journal (en particulier celui du 14 juillet 1943) et de lieu de réunions du comité directeur. Elle participe aussi à la distribution dans le métro du numéro du 14 juillet 1943.
Cette même année 1943, elle fait la rencontre, dans un groupe d’étudiants catholiques de la Sorbonne, de Geneviève de Gaulle, qui entre à Défense de la France. Elle rencontre également Jacques Lusseyran, responsable des Volontaires de la Liberté et qui adhère au mouvement. Jacques Lusseyran et Jacqueline Pardon se marieront après la guerre.
Le 20 juillet 1943, trahis par Elio Marongin, qui s’était infiltré dans le mouvement, de nombreux membres du mouvement sont arrêtés à la librairie « Au voeu de Louis XIII » par Bony, ou directement à leur domicile. Jacqueline Pardon en fait partie ; elle est conduite au siège de laGestapo, rue des Saussaies, et interrogée, brutalement parfois, mais sans tortures, une douzaine de jours de suite. Elle est souvent accompagnée de Jacques Lusseyran, qu’elle aide (il est aveugle), et grâce à leurs échanges et à la connaissance par Lusseyran de l’allemand, elle se limite à répéter ce que savent déjà les Allemands sur le groupe. Elle est ensuite incarcérée quelques mois à Fresnes, puis libérée en décembre 1943.
Philippe Viannay décide alors de la mettre au vert quelques semaines. En avril 1944, elle accompagne dans les maquis de Bourgogne et de Franche-Comté, Claude Monod, membre de Défense de la France et chef FFI de la région D (Bourgogne Franche-Comté) et dont elle est l’adjointe. Installée au PC d’Aignay-le-Duc, au nord de Dijon, Jacqueline Pardon est alors chargée d’assurer la liaison entre les différents groupes du maquis au moment des combats de Libération.
De retour à Paris le 11 septembre 1944, désireuse de poursuivre une action et un engagement intenses, elle retourne à l’Est du pays, chargée par l’armée d’une mission dans le Territoire de Belfort non encore libéré : établir des postes émetteurs clandestins. De retour de cette mission, Philippe Viannay la détache un temps, de décembre 1944 à janvier 1945, auprès du Mouvement de libération nationale, comme représentante de Défense de la France.
Puis, en avril 1945, elle participe à une mission de rapatriement des déportées ; traversant l’Allemagne dévastée, chargée de recueillir des renseignements et d’effectuer des recherches sur des déportés connus, elle découvre brutalement la réalité de l’univers concentrationnaire, notamment les camps de Bergen-Belsen et de Neuengamme.
Après la guerre, elle retourne à la vie normale ; enseignante en philosophie, elle participe activement à la vie associative du mouvement Défense de la France d’une part, ainsi qu’à celle du milieu issu de la Résistance (Association nationale des déportées et internées de la Résistance, Association pour des études sur la Résistance intérieure). Elle est coordinatrice du jury parisien du concours de la Résistance et de la Déportation ce qui lui donne l’occasion d’intervenir dans les établissements secondaires.
Jacqueline Pardon est décédée le 16 janvier 2009 à Paris.