Conférence : « La Résistance racontée par les tracts et papillons clandestins » – Jeudi 2 mars 2017
Rencontre prévu le 02/03/2017
Le 2 mars 2017, suite à la sortie récente du très bel ouvrage « Tracts et Papillons clandestins de la Résistance », publié par Pierrette Turlais aux Editions Artulis, l’association des Amis de la Fondation de la Résistance a organisé à l’Auditorium de l’Hôtel de Ville de Paris une rencontre autour de cette forme de résistance écrite qu’ont été les tracts et papillons clandestins.
Devant un très large public, dont les élèves et les professeurs du Collège Edouard Manet de Villeneuve-la-Garenne, Anne-Laure Brissac, Pierrette Turlais, Laurent Douzou et Antoine Grande, qui ont contribué chacun.e à cet ouvrage, ont élucidé les différentes dimensions de cette forme particulière d’expression de la Résistance.
En effet, dès les premières semaines de l’été 1940, des tracts sont apparus. Il s’agissait de petits bouts de papier écrit, collés clandestinement sur des vitrines, sur les murs des villes, déposés dans des boîtes aux lettres ou bien jetés au gré du vent. Pendant quatre longues années, ces petits bouts de papier ont hurlé la colère, la révolte et l’indignation contre les lois iniques de l’occupant et du gouvernement de Vichy. Fait de « n’importe quoi », ils ont été l’une des expressions de tous ceux qui se sont levés pour refuser l’inacceptable.
Ecoutez ici l’intégralité de cette conférence.
Pierrette Turlais, a évoqué la genèse de son ouvrage, né d’une part de la rencontre avec des historiens et spécialistes de la Résistance et d’autre part de la découverte de ces milliers de tracts et papillons – véritable trésor national, conservés au sein de la Réserve des livres rares à la BNF (Bibliothèque Nationale de France). Ces manuscrits, écrits à la « va vite », dactylographiés, imprimés, décuplés, ronéotypés racontent les années noires et la Résistance. Ils ont véhiculé un message de désobéissance vis-à-vis de l’occupant et de ses séides.
Laurent Douzou, à l’appui de tracts et papillons projetés sur grand écran, a démontré combien ces bouts de papier de petit format, manuscrits au tout début, ont participé de la résistance. Après la défaite en juin 1940, la portée de ces tracts et papillons a été essentielle par leur caractère éphémère et la puissance de leurs slogans véhiculés. Leur impact incitera les résistants à imprimer et diffuser les premières feuilles ronéotypées, puis les journaux clandestins. Les exemples analysés par l’historien montrent la capacité de ces tracts pour diffuser des informations dans le contexte répressif et violent des années noires. Ces « bouts de papier » ont su, en quelque sorte, donner du courage aux individus qui se sentaient isolés et les ont encouragés à agir. Ces tracts ont été une réaction à la censure et à la répression. Ils ont été des vecteurs d’action car ils lançaient des mots d’ordre et appelaient à la solidarité. Ils sont apparus comme une remarquable et efficace contre-propagande face à l’occupant et au régime de Vichy.
Abordant la lutte contre la répression, Antoine Grande a expliqué comment avec quelques mots percutants, accompagnés parfois des dessins, ces « papillons », ont dénoncé les actes de persécution et l’aide qu’apportaient les collaborateurs à l’occupant. Les écrits et les dessins qui y figurent ont également une portée symbolique. A titre d’exemple, le choix de mettre en avant les grandes dates du calendrier républicain affirme ainsi la certitude d’une future victoire. Ces tracts servent par ailleurs d’un outil qui fixe l’hagiographie des divers courants et organisations de résistance.
Anne-Laure Brisac, a évoqué le rôle joué par des tracts et des papillons dans la transmission de l’idée même de la Résistance. Elle a mis l’accent sur l’ampleur des messages diffusés à travers ces tracts – fragiles et bricolés – face à une politique répressive intense. Au travers de quelques exemples, elle a souligné leur dimension parfois poétique, croquant l’actualité de l’occupant avec un regard et une écriture mordants et coléreux, donnant tout son sens à la Résistance.