« Résistances chrétiennes dans l’Allemagne nazie, Fernand Morin, compagnon de cellule de Marcel Callo »
Par Dominique Morin Auteur : Dominique Morin Éditions : éd. Karthala, avril 2014
En 1944 dans l’Allemagne nazie, Fernand Morin a été le compagnon de cellule de Marcel Callo (béatifié en 1987 par Jean-Paul II) dans la prison de Gotha (Thuringe), avant de partir pour le camp de Buchenwald. Sa fille Dominique a rassemblé tous les témoignages et documents autour du groupe de Gotha dont il a fait partie, et publié les archives inédites de cette période.
RESUME
Fernand Morin est né en 1920. Après des études secondaires, il a effectué son apprentissage d’horloger à Rouen. La guerre venue, il revint chez ses parents à Flers (Orne). Il fut embauché comme ouvrier horloger. Comme tous les ouvriers de l’Orne travaillant les métaux, ils furent désignés d’office par la Chambre des Métiers pour partir en Allemagne fin octobre 1942. Arrêté en avril 1944 dans une rafle contre l’action catholique au sein du STO, il fut déporté au camp de concentration de Buchenwald. Il subit ensuite les marches de la mort avant d’être délivré en mai 1945 au sud de Lubeck. A son retour, il exerça son métier à Carentan (Manche) de 1951 à 1981 avant d’y prendre sa retraite. Dominique Morin, sa fille, retrace le parcours de Fernand en lien avec une croix en fleurs d’immortelles fabriquée en 1944 dans la prison de Gotha en Thuringe, et demeurée intacte jusqu’à aujourd’hui. Relique bientôt déposée dans une église, elle symbolise le partage de foi qui les unissait tous. La communion autour de l’hostie consacrée des chrétiens leur permit de maintenir une transcendance de l’homme au sein de l’Allemagne nazie.
Comment se figurer qu’ils étaient réduits au travail forcé au profit d’une race supérieure ? Les documents inédits publiés dans cet ouvrage le montrent pourtant. Ces documents risquaient jusqu’à aujourd’hui de gêner les mentalités, de heurter les sensibilités, de raviver des justifications ayant opposé les générations précédentes. Dominique Morin, raconte ce qui fut le combat d’essence spirituelle de ces huit jeunes martyrs morts pour leur foi pour en transmettre l’incroyable dignité aux générations suivantes. Marcel Callo fut béatifié le 4 octobre 1987 par le pape Jean-Paul II. A partir de ce jour, Fernand prit la parole pour évoquer avec beaucoup de retenue ses compagnons morts pour leur foi dans les camps de concentration nazis. Ils furent une douzaine de militants catholiques à être arrêtés en même temps, parmi lesquels Marcel Callo. Tous furent incarcérés à Gotha. Sur les douze, quatre rescapés des camps de concentration revinrent en France. Les onze compagnons de Fernand avaient tous signé le même motif de condamnation : « Par son action catholique auprès de ses camarades du Service du travail obligatoire, a été un danger pour l’Etat et le peuple allemand », avant leur départ en camp de concentration.
Pourquoi avoir attendu deux générations avant d’accéder au récit complet du témoin ? Il aura fallu deux générations pour laisser le temps au temps, temps humain de l’accès à la parole, temps des historiens pour mettre bout à bout les informations découvertes ici et là, avant de pouvoir reconstituer le parcours de Fernand en lien avec les données historiques disponibles. Il s’en dégage un aspect anti religieux du nazisme non mis en valeur jusqu’à présent. Il manquait le témoignage d’acteurs de cette époque, présents dans l’Allemagne nazie, qui aient été confrontés directement au système nazi de broyage des esprits afin d’extirper toutes références religieuses à l’œuvre au sein des travailleurs forcés. Fernand livre ce témoignage, grâce à Marcel qui lui a insufflé la force d’accéder à la parole, pour expliquer la grandeur de ce qu’ils ont vécu ensemble, ce à quoi ils se sont opposés, ce qui les a fait tenir dans la foi et traverse les âges jusqu’à aujourd’hui.
« Résistances chrétiennes dans l’Allemagne nazie, Fernand Morin, compagnon de cellule de Marcel Callo », Dominique Morin, éd. Karthala, avril 2014