Jean-René, fusillé le 11 août 1942
Par Nicolas Bonnefoix Auteur : Nicolas Bonnefoix Éditions : Editions de l'Atelier
Auteur du livre Jean-René, fusillé le 11 août 1942, paru en mai 2015 aux éditions de l’Atelier, Nicolas Bonnefoix s’est demandé qui se cache véritablement derrière le nom de la rue Jean (René) Bonnefoix, son arrière-grand-père, à Ivry-sur-Seine. Il a ainsi entamé de longues recherches, qui ont dévoilé tout un pan d’histoire familiale autant formidable que dramatique, au coeur de la Grande Histoire. Et cette histoire, il l’a fait revivre à travers le regard de son grand-père Jean (Germain) Bonnefoix, dit « Janoux« , alors à peine entré dans l’âge adulte…
1940 : Comme des millions de Français, devant l’avancée des troupes allemandes, Janoux et sa famille fuient la région parisienne, pour se rendre dans l’Aveyron. Quelques semaines plus tard, son père, chauffeur de la ville d’Ivry, reçoit l’ordre de réintégrer son poste. A son retour, le maire, communiste, n’est plus là. Une délégation spéciale s’est emparée de la mairie. Mais la résistance s’organise déjà.
En participant à une collecte en faveur des Jeunes Filles de France, Antoinette, la soeur de Janoux, et sa camarade Andrée Vermeersch, belle-soeur de l’ex-député Maurice Thorez, sont arrêtées par la police, puis emprisonnées à la Petite Roquette. Bien que relaxées à la suite de leur procès, elles sont envoyées au camp de Choisel, à Châteaubriant, en Loire-Atlantique.
De son côté, Janoux se joint à ses anciens camarades des JC pour participer à la propagande clandestine, notamment sous l’influence d’André Merlot et de Jean Compagnon, sans savoir que son père est « réquisitionné » par ce même Merlot pour transporter, au sein de l’ambulance municipale, des tracts communistes anti-allemands et sans doute des armes.
A Châteaubriant, Antoinette nourrit de fortes amitiés avec les autres jeunes femmes du camp, les Bistouillardes, ainsi qu’avec quelques jeunes hommes qui les courtisent. Certains d’entre eux seront fusillés comme otages en représailles à des attentats contre des officiers allemands, à commencer par Claude Lalet et Guy Môquet.
Une jeune voisine de la famille, Léa, dont s’est épris Janoux, parvient à faire libérer Antoinette en 1942, grâce à ses contacts dans le milieu de l’édition et par l’entremise d’un mystérieux et très influent « Monsieur ». Mais au même moment, ayant mis au jour les réseaux de la propagande et celui de la Jeunesse Communiste, les Brigades Spéciales procèdent à un gigantesque coup de filet. En cette fin juin 42, Jean-René est emprisonné au Dépôt de Paris. Il n’aura pas droit à un procès. Il n’aura pas non plus la chance d’être sauvé par le “Monsieur” qui s’est occupé de la libération de sa fille. Il va être fusillé comme otage en représailles aux attentats commis dans Paris à l’été 42, notamment celui sur des officiers allemands en exercice le 5 août au stade Jean-Bouin.
Promu au grade de sergent (FTPF) a posteriori, Jean-René Bonnefoix a été plusieurs fois décoré à titre posthume (Croix de guerre 1939, médaille militaire, médaille de la résistance française…). Le 18 mars 1945, la ville d’Ivry a organisé des funérailles pour tous ses fusillés. A la fin de la guerre, le Général de Gaulle est également allé se recueillir dans ce qui est devenu le “Carré des fusillés” du cimetière nouveau, à Ivry. Et le 19 août, la rue de Beauvais a été rebaptisée rue Jean Bonnefoix en l’honneur du chauffeur municipal.
Sa famille ne savait pas grand-chose sur lui. Le traumatisme, sans doute, a été tel que l’on n’a pas forcément évoqué son action (surtout qu’elle était secrète). Mais il y a deux ou trois ans, en déménageant le pavillon de Jean, parti en maison de retraite, ses enfants sont tombés sur la correspondance du grand-père, quand il était emprisonné au Dépôt. De multiples recherches dans les archives, tant municipales que départementales, au Musée de la Résistance comme à celui de la Shoah, ont permis à Nicolas, l’arrière-petit-fils, de retracer son parcours. Il a pu bénéficier aussi du précieux témoignage de de son grand-père « Janoux » et de celui de sa grand-tante, la fille cadette Raymonde (laquelle assura en intérim le travail de propagande de son frère lorsqu’il fut hospitalisé, des suites d’un accident du travail aux Forges Lemoine).
Sur sa lancée, Nicolas s’intéresse dorénavant à un autre pan de l’arbre généalogique, celui de sa grand-mère Jacqueline Bourru, épouse de Jean “Janoux” Bonnefoix, des ancêtres fortement impliqués dans les réseaux de résistance aussi bien en région parisienne que dans l’Ain.