Il y eut d’abord le chant des oiseaux
Par Lucien Neuwirth Auteur : Lucien Neuwirth Éditions : Éditions du Félin 2008
Dans la préface du livre qu’il vient d’écrire aux éditions du Félin, Lucien Neuwirth, dialogue avec Simone Veil. Deux grands « témoins de ces années là » qui se vouent amitié et admiration, chacun à leur manière rescapé par miracle de l’enfer, deux grands humanistes qui ont travaillé avec le succès que l’on sait sur la condition féminine et lutté pour la vie et le bonheur des familles. Ces quelques mots que Lucien Neuwirth prononce au cours de ce dialogue résument la dimension humaine de cet homme : « Ce que je peux vous dire, c’est que je repartirais sur le même chemin s’il le fallait ».
Et quel chemin ! Quelle extraordinaire odyssée fut celle de ce grand Français libre !
Au soir de sa vie, dans cet ouvrage, avec verve, il nous livre le témoignage authentique d’un homme qui fit partie pendant quatre années de « ces fous magnifiques » : ces hommes qui n’ont pas cédé.
Septembre 1940 il a 16 ans, à Saint-Etienne c’est sur un poste de radio bricolé qu’il écoute un général « qui semble intéressant », puis avec quelques amis rejoint le mouvement de Résistance « Espoir » de Jean Nocher : Bel exemple de la précocité de la Résistance dans la France profonde. Grâce à une jeune coiffeuse, il contacte la sœur du général de Gaulle, Madame Agnès Caillau, qui lui donne la photographie de son frère, qu’il va alors se charger de diffuser dans toute la région, afin de donner un visage à cette voix venue de Londres. Recherché, arrêté, il ne lui reste plus qu’une seule issue rejoindre : l’Angleterre avec la bénédiction de sa chère mère dont il rapporte ces mots : « Tu as raison, j’expliquerai à papa… » et son père pensa le soir : « Il a bien fait ».
Le chemin est difficile pour rejoindre Londres, par les Pyrénées surtout l’hiver, par Miranda avec huit mois d’internement, par Gibraltar et la traversée périlleuse du golfe de Gascogne pour enfin rencontrer le général de Gaulle et revêtir l’uniforme de « ces soldats pas comme les autres » qu’étaient les parachutistes S.A.S. du colonel Bourgoin.
Juin 1944, Lucien Neuwirth, fait partie des premiers Français qui vont participer à la Libération de leur pays. Largué par planeur en Bretagne il va former avec deux frères d’armes un commando de trois jeunes intrépides revanchards et mener à bord d’une jeep une véritable guérilla motorisée au milieu des troupes allemandes en retraite. Au fil des jours et des semaines de l’été et de l’automne 1944, à travers, les campagnes de France ils partageront les joies et les douleurs des Français enfin libérés. Noël 45 au milieu des troupes américaines il est de ceux qui vont faire face dans les Ardennes aux derniers sursauts de III° Reich au cours desquels il est blessé. A peine convalescent il est volontaire pour participer en avril 1945 à l’une des dernières grandes opérations aéroportées alliées pour libérer la Hollande. Au cours d’une patrouille le petit groupe dont il fait partie est fait prisonnier et au mépris des lois de la guerre traîné vers une clairière pour être fusillé. Tous les hommes sont abattus sauf Lucien Neuwirth qui ne se retrouve qu’assommé et légèrement blessé grâce à quelques pièces de monnaie anglaise ! qui ont miraculeusement arrêtées les balles, destinées « à le faire basculer dans un autre monde ». Réveillé « …par le chant des oiseaux et les caresses des flocons de neige… », il doit à « bon officier Allemand » de rejoindre un camp de prisonniers d’où il est rapidement libérés par les troupes anglaises qui courent vers la victoire de mai 1945.
Il faut lire, le récit de cette extraordinaire épopée écrit sur un ton inimitable fait de simplicité, de modestie, récit dont la force reflète à n’en pas douter le parcours de ce grand Monsieur qu’est Lucien Neuwirth.